Comme cela était prévisible, la Cour de cassation n’a pas maintenu le raisonnement de la Cour d’appel de Versailles, qui avait relaxé l’auteur de propos reconnus diffamatoires et condamné le directeur de publication du magazine ayant reproduit les termes litigieux.
Afin d’expliquer cette différence de traitement, les juges d’appel avaient affirmé que « la prudence dans l’expression doit ainsi être appréciée différemment chez un homme politique, interrogé à chaud sur un sujet sensible et un journaliste pouvant visionner les propos excessifs au travers de son expérience et d’une approche juridique pointue ». Pourtant, si le député Jacques Myard a effectivement été interrogé à l’improviste par téléphone sans aucun contrôle sur ce qui allait être publié, à aucun moment il n’est revenu sur les affirmations qui lui sont prêtées. Et puis, en supposant qu’il ne soit pas familier avec la déontologie journalistique, l’arrêt le présentait comme un élu politique à l’échelle nationale « souvent interrogé par voie de presse » et « juriste de formation », qui s’exprime en plus sur un « thème général dont il est un spécialiste ». Il ne s’agit donc pas d’un novice piégé par un journaliste !
Dans son arrêt rendu le 8 novembre 2011, la Cour de cassation a donc annulé et renvoyé devant la Cour d’appel de Paris la seule partie qui a pu faire l’objet d’un pourvoi, c’est-à-dire la condamnation du responsable de l’hebdomadaire Le Point. La motivation relève de l’évidence :
« Mais attendu qu’en se déterminant ainsi, sans se prononcer, comme l’y invitaient les parties, sur l’existence ou la non-existence, en la circonstance, d’un débat d’intérêt général et alors que l’admission de la bonne foi en faveur de l’auteur des propos incriminés a pour effet d’exclure non seulement la responsabilité pénale dudit auteur, mais également celle du directeur de la publication du site ou de l’organe de presse dans lequel ces propos sont insérés, la cour d’appel n’a pas justifié sa décision ; »
Hélas, le nouvel examen de cette affaire par le juge du fond est bancal, puisqu’il n’a plus la possibilité d’intervenir sur les critères établissant la bonne foi de l’auteur des propos diffamatoires. Puisque la Cour de cassation a reproché à la cour d’appel sa logique qui voulait que les deux prévenus ne soient pas jugés sur la même base, il aurait été intéressant de pouvoir chercher de quel côté se trouvait le manquement : les critères étaient-ils trop sévères pour l’un ou bien les éléments justifiant la relaxe de l’autre étaient-ils trop légers ?
Rappelons que la Cour d’appel de Versailles avait bien retenu l’existence d’une « allégation diffamatoire » à l’encontre d’une association cultuelle, puisque « le terme d’enfermement, qu’il se révèle concerner un enfermement physique ou psychologique, revêt une connotation telle que sans renvoyer automatiquement à une infraction pénale caractérisée elle sous-entend une atteinte à la liberté de penser ou de former leurs propres convictions, s’agissant au surplus d’enfants ». En particulier, la tentative de l’homme politique d’avancer l’exception de vérité avait échoué, faute d’obtenir « une preuve complète, parfaite et corrélative aux imputations ou allégations ».
Du coup, puisque la Cour d’appel de Paris ne pourra pas revenir sur la relaxe du premier, le renvoi est purement symbolique en ne laissant aucun choix à la juridiction compétente.